Alors que l’armée israélienne poursuit ses opérations dans la bande de Gaza, appelant les habitants de 17 quartiers du Nord à évacuer la zone, le père missionnaire Gabriel Romanelli raconte que «la vie à Gaza devient insupportable». Entre la trop rare aide humanitaire, la chaleur étouffante et les prix exorbitants des denrées alimentaires, le curé de Gaza appelle inlassablement à la fin de la guerre, pour «donner un signe vrai d’espoir».
Jean-Benoît Harel – Cité du Vatican
«La bande de Gaza manque de tout». Le constat du père Gabriel Romanelli est sans appel sur la situation humanitaire de Gaza qu’il juge «insupportable». Depuis plus de 630 jours, la population civile tente de survivre au gré des bombardements israéliens et des ripostes du Hamas. Dimanche 29 juin, l’armée israélienne a ordonné aux civils d’évacuer des dizaines de quartiers situés dans le nord du territoire, notamment celui de la vieille ville de Gaza et le quartier de Jabaliya.
Les 500 chrétiens, catholiques et orthodoxes, qui vivent dans l’enceinte de la paroisse de la Sainte-Famille n’ont pas reçu l’ordre de partir, assure le père Romanelli, craignant chaque jour pour la vie de ses fidèles: «toute la bande de Gaza est un théâtre de guerre, il n’y a pas un endroit plus sûr que l’autre». Les bombardements continuent même tout près de l’église, traumatisant la communauté qui a déjà compté des morts en son sein au début de la guerre.
Le père Romanelli lors d’une séance de catéchèse avec les jeunes de la paroisse. (P. Romanelli)
La loi du plus fort
Fin mai, Israël a annoncé la levée du blocus de la bande de Gaza, et l’arrivée de l’aide humanitaire à travers une fondation controversée contrôlée par les Israéliens et les Américains. «Ce n’est pas la solution, s’indigne le curé de la paroisse de la Sainte-Famille, dans la ville de Gaza où habite plus d’un million de personnes, il n’y a pas un seul centre de distribution. Le plus proche est au sud de Gaza, à l’extérieur de la ville».
Les 500 réfugiés de la paroisse vivent des réserves faites avant le début du blocus début mars 2025. «Mais chaque jour devient plus difficile parce qu’il n’y a pas de nouvelle aide», poursuit le père Romanelli. De plus, l’aide qui arrive au compte-goutte et sans organisation générale, est parfois volée par les populations affamées, explique-t-il. «Sans système effectif, c’est la loi du plus fort qui s’applique, celui qui peut aller chercher l’aide met en danger sa vie». Plusieurs dizaines de Palestiniens ont d’ailleurs perdu la vie en venant chercher cette aide vitale.
Une inflation sans limites
Outre la rareté de l’aide alimentaire, il est presque impossible de s’approvisionner dans les marchés locaux. La production locale étant quasi inexistante, les prix des aliments importés ont explosé: 250 euros pour du café (1000 shekels), un élément central de la culture moyen-orientale de Gaza, 15 euros un kilo de tomates (60 shekels), 75 euros un kilo de sucre (300 shekels)…
De plus, la chaleur devient étouffante, atteignant presque les 40°C ressentis, témoigne encore le missionnaire d’origine argentine installé à Gaza depuis 2019. Une humidité qui rend difficile la claustration des 500 chrétiens dans l’enceinte de la paroisse, et à laquelle il faut ajouter les coupures d’internet et de réseau téléphonique, qui ont interdit les communications pendant cinq jours d’affilée il y a peu.
Des activités sont organisées pour occuper les enfants. (P. Romanelli)
Donner un signe d’espoir
Face à ce drame, les chrétiens de Gaza et leurs voisins s’organisent. «On essaye de continuer notre vie de prière, de service aux malades, aux blessés, aux personnes âgées, et même de faire des activités pour les enfants», poursuit le père Romanelli. Les célébrations liturgiques, les jeux et diverses autres occupations rythment ainsi la vie des enfants gazaouis vivant dans la paroisse.
Si la paroisse n’est pas plus sécurisée qu’un autre bâtiment, les familles chrétiennes ont choisi de rester auprès de l’église; «on se sent plus protégés chez Jésus», répètent-elles. Mais le plus urgent pour le père Romanelli, est la fin de la guerre, «seul signe d’espoir pour les habitants, pour qu’ils puissent rebâtir leur maison et leur vie».