Une frappe israélienne contre la seule église catholique de Gaza a heurté la population chrétienne qui vit dans le dénuement. Durement éprouvés par la guerre, observe le géopoliticien Jean-Baptiste Noé, les chrétiens entendent jouer un rôle de pacificateurs quand viendra le temps de la reconstruction.
Il s’agissait de retirer la poussière qui recouvrait les panneaux solaires installés sur la toiture de l’église. Indispensables panneaux, qui permettent à la paroisse de disposer d’un peu d’électricité, essentielle pour survivre au quotidien. Quand une attaque conduite par un tank et des drones bombarde le complexe de la Sainte-Famille, tuant trois personnes, dont le concierge de la paroisse, et blessant le curé Gabriel Romanelli. L’onde de choc est brutale, car ce drame s’ajoute à beaucoup d’autres, notamment les près de 200 civils morts alors qu’ils venaient chercher de l’aide alimentaire. Le drame humanitaire qui frappe la population de Gaza est d’autant plus insoutenable qu’il semble sans fin et sans solution. Cela fera deux ans en octobre 2025 que le territoire palestinien est frappé par la guerre.
La prière et l’espérance
Le cardinal Pierbattista Pizzaballa, patriarche latin de Jérusalem, s’est rendu sur place pour consoler les blessés et célébrer la messe dominicale dans l’église endeuillée. Dans le bombardement, la croix de l’église est demeurée debout, symbole d’une espérance qui ne faiblit pas. C’est ce qu’a rappelé le cardinal dans son homélie, précisant que son voyage n’était ni diplomatique ni politique, mais d’abord pastoral, même si sa venue et la conférence de presse qu’il a ensuite réalisée à Jérusalem ont bien évidemment une dimension politique. “Dans cette mer de violence, nous voyons et expérimentons que le mal, même très puissant, ne peut pas éteindre la vie en nous. Nous devons donc être forts et continuer à être une présence vivante ici” a-t-il ainsi rappelé, précisant également qu’il ne travaille pas que pour les chrétiens, mais pour tous les habitants de Gaza, invitant à rejeter la haine qui peut monter pour bâtir une paix véritable. Bien que les chrétiens soient une infime minorité, c’est bien ce rôle fondamental de pacificateurs qu’ils doivent jouer et qu’ils devront tenir quand cesseront les armes et que viendra le temps de la reconstruction.
La parole et l’action
À Rome, Léon XIV n’est pas resté immobile. Peu de temps après l’attaque, il a téléphoné au Premier ministre israélien pour lui dire sa stupeur et la nécessité de mettre un terme à la guerre et de protéger les populations civiles. Pas seulement les 600 chrétiens qui vivent dans la paroisse de la Sainte-Famille, mais tous les habitants de Gaza. La haine et la vengeance étant le terreau du Hamas et des guerres futures, c’est ce cycle de violence qu’il faut briser.
Le 21 juillet, Mahmoud Abbas, chef de l’Autorité palestinienne, a appelé Léon XIV pour un échange diplomatique intense. Bien que Mahmoud Abbas soit de plus en plus mis en périphérie des négociations, l’OLP étant dépassée notamment par le Hamas, le Saint-Siège continue de le soutenir, notamment parce qu’il le reconnaît comme président de l’État palestinien.
Pour le Saint-Siège, la Palestine est un État
En effet, depuis 2015, le Saint-Siège a officiellement reconnu l’existence de l’État palestinien, par un accord conclu en juin 2015 et entré en vigueur en janvier 2016. Cela fait donc dix ans que, pour le Saint-Siège, la Palestine est un État. Pour le pape François, qui a porté cet accord, il s’agissait de favoriser le processus de reconnaissance internationale de l’État palestinien, étant entendu que le Saint-Siège a toujours défendu une solution à deux États, avec Jérusalem disposant d’un statut international.
Léon XIV a réaffirmé cette reconnaissance au cours de cet entretien, montrant ainsi le soutien qu’il porte aux structures politiques légitimes de Palestine. Par cet appel, Mahmoud Abbas cherche également à revenir dans le jeu diplomatique et à demeurer un acteur incontournable au moment où s’ouvriront des négociations, afin qu’Israël n’ait pas que le Hamas comme seul interlocuteur. Preuve que la présence de l’Église sur place peut contribuer à élaborer un processus de paix.